ARMAN ET L'ART AFRICAIN

     
      Arman (Armand Fernandez, 1928-2005) est l’une des figures majeures du Nouveau Réalisme, mouvement fondé au début des années 1960 par Pierre Restany. Aux côtés d’artistes comme Yves Klein, César ou Niki de Saint Phalle, Arman cherche à intégrer la réalité quotidienne dans l’art, en utilisant les objets de la société de consommation. Proche de l’École de Nice, il s’inscrit dans une démarche expérimentale où la récupération, l’accumulation et la destruction deviennent des gestes créateurs. Ses Accumulations, Colères ou Coupes témoignent d’un intérêt constant pour la matérialité et la mémoire des objets.

Parallèlement à cette pratique, Arman développe très tôt une passion pour l’art africain traditionnel. Dès les années 1950, il commence une collection importante de sculptures, masques et objets rituels provenant d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Cet intérêt s’inscrit dans un contexte historique : depuis le début du XXe siècle, de nombreux artistes européens, de Picasso à Giacometti, ont trouvé dans les formes africaines une source d’inspiration pour renouveler le langage plastique occidental. Arman s’inscrit dans cette filiation, mais son approche se distingue par une attention particulière à la fonction spirituelle et symbolique de ces œuvres.
 
Lot 73 : ARMAN, Bas relief de cuillères africaines, bronze. Lot 72 : Tête Nok (coupe longitudinale), bronze.

En 1996, le Musée d’art contemporain de Marseille a présenté l’exposition Arman et l’art africain, qui mettait en lumière le dialogue entre ses créations et les pièces de sa collection. Les masques fang, les statuettes baoulé ou les fétiches kongo y dialoguaient avec ses accumulations d’objets manufacturés. Cette confrontation montrait comment Arman voyait dans l’art africain une même logique de transformation : donner forme à une force invisible à travers la matière.
 
Catalogue de l'exposition " ARMAN & l'Art africain " au Musée d'Art Contemporain de Marseille en 1996

Pour Arman, l’objet industriel, au même titre que l’objet rituel, conserve une dimension énergétique et une mémoire. Son intérêt pour les arts africains ne relève donc pas d’un exotisme de collectionneur, mais d’une réflexion sur la puissance expressive des formes. En reliant ainsi les pratiques traditionnelles africaines à la modernité occidentale, Arman illustre la continuité entre les gestes de création d’hier et ceux d’aujourd’hui.
Ainsi, l’art africain a profondément nourri la pensée et l’esthétique d’Arman. Il lui a permis de concevoir l’objet non plus comme un simple produit du quotidien, mais comme le vecteur d’une présence, d’une tension entre le matériel et le spirituel — une idée qui traverse l’ensemble de son œuvre.


Sources : https://www.armanstudio.com/